Une école écologique ? A l’heure des rapports alarmants du GIEC, il me semble que ce serait véritablement une école… logique ! On fait le point ensemble sur la nécessité d’une éducation d’individus conscients du lien qui unit tous les êtres vivants les uns aux autres.
Plan de l'article
Pas d’écologie sans école !
Notre maison commune
Il existe mille et une manière de définir l’écologie. Pour faire simple, disons que le terme « Écologie » “comprend l’ensemble des relations existantes entre les individus végétaux ou les associations végétales d’une part et la station d’autre part” (source : CNRTL), le terme “station” signifiant “le milieu” où vivent ces espèces.
En fait, le terme « éco- » correspond au nom « oikos » (en grec), qui signifie « la maison ». Ainsi, le terme “écosystème” désigne l’ensemble des êtres vivants et des éléments non-vivants d’un milieu qui sont liés vitalement entre eux. En d’autres termes, c’est le système de fonctionnement et d’interactions des habitants de la maison-terre les uns avec les autres
Et, quand on ajoute “logos” (le discours, la science) à “éco-“, on obtient l’écologie, qui désigne, littéralement, le discours/la science de la maison. Plus précisément, le discours/la science des “milieux/environnements” où vivent des espèces.
L’écologie et l’école : des milieux séparés
Issue de la biologie et de la zoologie, l’écologie s’est développée en tant que science dans la 2ème moitié du XIXème siècle. Elle est ensuite devenue un savoir scolaire, non sans peiner à trouver sa place dans les programmes. En effet, marquée idéologiquement “à gauche”, ultra-politisée dans un contexte d’épuisement des ressources dites “naturelles”, l’écologie a eu des difficultés à intégrer l’école. Et en a toujours, malgré le développement des sciences de l’environnement, l’invention de la notion de “développement durable” et l’insertion dans les manuels scolaires de sujets tels que le réchauffement climatique, les extinctions d’espèces, etc.
Pourtant, l’école est LE lieu d’émergence de la sensibilisation aux problématiques d’ordre écologique : la maison brûle, nous sommes tous concernés. D’autant plus les décideur/euse.s du futur, n’est-ce pas ? Ecole et écologie, qui – rappelons-le – n’entretiennent pas de lien étymologique, sont pourtant fortement liées l’une à l’autre puisqu’elles sont toutes deux interdépendantes : le milieu qui nous accueille (notre “oikos”) risque fort de ne plus être en mesure d’accueillir les générations futures. A elles incombera alors la tâche d’inventer de nouvelles relations avec ce milieu. Pour ce faire, il vaut mieux connaître ce milieu… Et autant commencer maintenant. Tous petits. A l’école, donc.
Voyons donc quelles sont les priorités écologiques actuelles et comment y sensibiliser les enfants au sein d’une école verte, plus écologique.
Priorité de l’écologie : ramener la nature dans nos vies
Le Bilan de mi mandat de la Commission Europe Ecologie les Verts au Parlement européen fournit à tout le monde une feuille de route pertinente sur les priorités sociétales liées à l’écologie. En laissant de côté tout débat idéologique ou partisan, j’aimerais me baser sur ces priorités écologiques globales dans la mesure où elles nous permettent ensuite de mieux comprendre leur application dans le domaine de l’éducation et de l’école.
Au niveau européen, les priorités écologiques post GIEC 2021 sont les suivantes :
– Nos forêts toujours en danger : surexploitations, coupes rases, brûlages intensifs, trafic illégal de bois et monopole des puissants lobbys de l’industrie forestière font que “le puits forestier de l’Union européenne sera réduit de moitié d’ici 2050 et la biodiversité forestière sera détruite” (p.15).
– Biodiversité, notre assurance vie : il y a nécessité de protéger au moins 30% des espaces terrestres et maritimes. Cette protection nécessite de forts moyens financiers et juridiques pour lutter contre la surexploitation des ressources dites “naturelles”.
– Lier les problématiques écologiques et sociales : il est absolument fondamental de lier entre elles les différentes problématiques concernant la préservation de la biodiversité, l’éradication de la pauvreté, la lutte contre les pesticides, la biopiraterie, les dévastateurs de l’agro-industrie ou le rôle des peuples dits “autochtones”. Pourquoi ? Parce que l’écologie n’est pas une problématique isolée des autres, elle est ancrée dans nos vies, dans nos préoccupations sociales. Si la pauvreté perdure, si l’industrie basé sur un mode de fonctionnement capitaliste continue sa croissance, si les compétences de peuples savants disparaissent, il est impossible que les ressources terrestres soient préservées.
– Surpêche et politique agricole commune : la révision du règlement de contrôle des pêches actuellement en cours doit permettre la reconstitution des populations de poissons et protéger les écosystèmes marins. Par ailleurs, la lutte contre la manière dont sont gérées les subventions allouées à la Politique agricole commune vise à mieux répartir ces aides et, surtout, à les dépenser de manière à promouvoir les initiatives respectueuses de l’environnement.
– Bien-être animal : la fin des cages et l’instauration d’une commission d’enquête sur le transport des animaux sont 2 des priorités portées par le mouvement. Lié à la problématique écologique, la question animale est au cœur des débats à la fois sociétaux (culturels, alimentaires, etc.), économiques et écologiques.
– Reconnaissance du crime d’écocide : la punition des responsables de pratiques dévastatrices de ressources naturelles devra passer par la transformation de l’arsenal juridique (reconnaissance du crime d’écocide dans le droit pénal de l’UE).
Vous allez me dire “Très bien ! Mais quel est le lien avec l’école dehors ?”. Il est direct, à mon avis. En effet, toutes ces recommandations, actuellement portées par les mouvements écologistes européens, doivent s’envisager sur le moyen terme. Même si l’action politique, menée par les adultes, peut aboutir à une application sur le court terme, elle a besoin d’assurer ses arrières. Et comment assure-t-on les arrières d’une société ? Par l’éducation des enfants, futurs décideurs de demain ! Allez, tout le monde à l’école ! Mais pas n’importe laquelle… celle qui met tout le monde… DEHORS
Protéger ce que l’on connaît grâce à l’école écologique
Plus les générations futures sont sensibilisées aux problématiques environnementales, plus elles grandissent et évoluent dans la préoccupation pour ces sujets essentiels, plus elles posséderont cette culture commune de la préservation de notre environnement. Imaginez ! Des décideurs politiques, des avocats, des enseignant.e.s, des entrepreneur.e.s (etc.) acquis à la cause de la préservation de l’environnement ! Quel beau projet ! Mais comment faire ?
C’est tout l’enjeu porté par l’éducation à l’environnement qui tente, depuis les années 80, de construire des ponts entre l’école et les organismes liés à la question écologique (voyez, par exemple, le réseau FRENE, anciennement Ecole et Nature, et les actions des organismes régionaux Graine). La difficulté que ces organismes ont eu – et ont encore – dans leur démarche de sensibilisation du monde éducatif aux problématiques environnementales – vient du fait que ce sont deux systèmes séparés. L’éducation nationale possède une culture éducative propre, des formations initiales et continues spécifiques et des programmes scolaires peu malléables. L’école fonctionne selon ses propres règles, des règles construites pour des millions de personnes, enseignantes et élèves, et – comme toute structure complexe – souffre d’une rigidité qui lui porte préjudice. On est bien loin de la flexibilité à laquelle nous oblige les priorités écologiques actuelles.
Malgré tout, la préoccupation pour l’urgence écologique a heureusement fait son chemin dans l’institution éducative. Les classes vertes fleurissent ça et là, les programmes encouragent une sensibilisation transversale aux problématiques écologiques (voir le B.O. Transition écologique) et les enseignants motivés arrivent à se former sur la question (voir les ateliers Canopé). Cependant, même les écoles dites “vertes” sont bien loin des résultats obtenus par les mouvements dits de “classe dehors” ou d’“éducation” par la nature en termes de sensibilisation à l’écologie (nous verrons ceci dans un prochain article 😉
Voyons déjà ce qu’apporte l’école écologique aux enfants (et, à la planète, du même coup !)
L’école verte, un premier pas vers une sensibilisation écologique
Le projet porté par l’école publique est la formation de futurs citoyens. Une fois que l’on a dit ça, on a pas dit grand chose. Il n’y a qu’à voir les débats autour des compétences-clés pour le XXIème siècle. A quoi former les enfants en priorité, avec quoi et pour quoi faire ? Parmi les innombrables et sympathiques priorités éducatives, celle de l’écologie commence à fédérer de nombreux projets d’enseignants, de parents et de directions administratives. L’école verte est en croissance Cela suffit-il ? Non. Mais c’est un bon début !
Une brève recherche sur internet à partir des termes “école écologique” vous amènera sur des sites portant :
– soit sur la construction de bâtiments scolaires dit écologiques ou “bioclimatiques” (une école écologique comme c’est le cas pour cette école de Charente). On y parle éco-construction, murs en paille, panneaux photovoltaïques, recyclage et matériaux durables.
– soit sur les nombreuses initiatives d’enseignants et de parents d’élèves visant à rendre leur école plus “verte”. On vous donne, par exemple, ici, des astuces pour l’éducation à l’écologie. Parmi ces initiatives, on notera la multiplication des « végétalisations » de cours d’école.
=>Si vous êtes intéressé.e.s, voyez l’article sur l’excellent Manuel de l’école du Dehors !
– ou bien encore sur la réorganisation du temps scolaire et de certains programmes (primaire ou collège) pour y faire la part belle à l’éducation à l’environnement. Voyez les exemples de programmes sur ce site.
La question d’une véritable éducation des enfants à l’écologie, à l’école, passe inévitablement par ces 3 types d’initiatives : plus les enfants seront en contact avec un environnement sain et respectueux des ressources, plus ils seront sensibilisés à la question dans leur vie.
En effet, que se passe-t-il quand vous aménagez un jardin potager dans l’enceinte de l’école ? Quand vous végétalisez une cour de récréation scolaire ? Quand vous organisez un chantier participatif avec les élèves pour la “construction écologique” d’un poulailler ou d’un abri en terre et paille ? Ou même quand vous installez des plantes dans votre classe ?
Il se produit une sorte d’ancrage, dans les représentations du monde que possèdent les enfants, de l’idée que “la nature” fait intrinsèquement partie de leur vie. On n’aime que ce que l’on connaît. Or il faut beaucoup aimer pour ensuite vouloir protéger. La sensibilisation aux problématiques écologiques ne peut donc se passer de l’ancrage psycho-affectif. Or ce dernier s’effectue progressivement, par répétition, par mimétisme, par imprégnation quotidienne. En proposant à l’enfant un univers où végétaux et animaux partagent sa vie, il y a de plus fortes probabilités que l’adulte qu’il deviendra aura une idée précise de ce qui se joue dans la lutte écologique.
D’autant plus si vous mettez en place une pédagogie actionnelle : construire, planter, bêcher, arroser, cuisiner, déguster… sont autant de manières d’ancrer chez l’enfant une connaissance expérientielle des éléments végétaux et des animaux qui l’entourent. En plus de développer chez lui des habiletés motrices, cognitives et sociales, l’action directe sur et avec la “nature” le sensibilise aux problématiques écologiques bien plus que tous les discours du monde sur l’effondrement.
Donc, oui ! Faites le maximum pour “verdir” vos établissements, votre cour d’école, de crèche ou de jardin d’enfants ! Et surtout, faites directement classe dans ces espaces ! Une classe actionnelle, où vous construisez avec des bâtons pour faire des maths (par exemple), où vous observez les espèces sur le terrain pour mieux les comprendre, etc. Vous aménagerez ainsi les conditions propices au développement, chez les enfants, d’une “conscience écologique” transversale et non réduite aux cours d’EPS ou d’éducation à l’environnement.
Bref, c’est la rentrée : SORTEZ !
Pour aller plus loin : de l’école écologique à l’école dehors
Vous pouvez aussi aller plus loin en sortant avec les enfants en dehors des frontières de l’école. Cette étape suivante est en effet celle d’une sortie de l’univers scolaire pour se rendre dans un milieu extérieur végétalisé et non scolaire pour y faire classe ! La démarche de faire classe dehors constitue un pas supplémentaire vers la sensibilisation écologique.
=> Notons que cette étape peut aussi être menée en parallèle à la première démarche de “faire croître de la nature” dans l’école. Il est en effet parfois difficile, d’un point de vue logistique, administratif (et même parfois pédagogique) de faire classe dehors tout le temps !
Pour découvrir comment sensibiliser les enfants aux problématiques environnementales lors de séances en école hors les murs, laissez-moi votre adresse mail pour que je vous prévienne de mon prochain article sur le sujet !
Et vous ? Quelles “activités écologiques” faites-vous avec vos élèves et/ou vos enfants ? Quels sont les petits pas du quotidien qui sensibilisent les enfants qui vous entourent aux problématiques écologiques (sauvegarde de la forêt, préservation des ressources maritimes et terrestre, compréhension des lois qui régissent les marchés économiques, sensibilisation au bien-être animal, etc.)
Partagez vos actions et vos idées en commentaire sous cet article pour faire avancer ensemble l’éducation écologique
2 Responses
Et oui ! des changements ont déjà été réalisés à l’école (on ne disseque plus les grenouilles par centaine en cours de bio au lycée) mais il reste du chemin à faire.
Tu dis « reconnaissance du crime d’écocide dans le droit pénal de l’UE », OK bien sur on n’a que ce levier, mais pourtant ça devrait être mis en place au niveau MONDIAL.
Voilà…j’ai trouvé ces idées super puissantes, réalisables et donc j’ai apprécié cet article. Grand merci à toi.
L’idée fait son chemin, lentement mais sûrement, en effet… Malgré l’engagement des politiques sur ce sujet, je pense que si chacun fait sa part (la légende du Colibri !), nous avancerons plus vite dans la sensibilisation écologique auprès des enfants !