Bonjour, je m’appelle Laura Nicolas, créatrice du site-ressource Ma Petite Forêt et je vous écris pour vous indiquer les 5 erreurs les plus fréquentes que font les personnes qui veulent se lancer dans un projet éducatif en nature.
En effet, vous avez été nombreuses/nombreux à répondre au sondage destiné à vous aider à monter votre projet éducatif en nature et beaucoup d’entre vous sont ralentis par des difficultés et des contraintes qu’ils ne savent pas comment contourner.
J’ai commencé ma carrière d’enseignante dans une petite école primaire rurale entourée de nature. J’aurais pu, à ce moment-là déjà, me lancer dans l’enseignement dehors. Mais je me suis retrouvée face à la même difficulté que vous : comment concrètement enseigner en extérieur ? Je ressentais :
– La même angoisse que vous à l’idée qu’un enfant se blesse ou se perde,
– La même appréhension face aux attentes des parents et de l’institution par rapport au programme scolaire,
– Et peut-être les mêmes a priori sur l’utilité et l’efficacité de la « pédagogie du Dehors » (surtout qu’il y a 15 ans, ce n’était pas très connu !)
Ce qu’il m’aurait fallu, à ce moment-là, c’était un accompagnement, une sorte de guide dans les différentes étapes de la mise en place de mes cours en extérieur ou de mes sorties en nature avec les enfants.
N’ayant pas cela à disposition à l’époque (je vous parle d’un temps que les moins de 15 ans ne peuvent pas connaître !), je suis tombée non pas dans 1, ni 2 ni même 3 panneaux, mais bien dans 5 erreurs !
Je vais vous les donner afin que vous puissiez les éviter et vous lancer sereinement dans l’aventure de l’Ecole Dehors !
PANNEAU n°1 : La paralysie
J’ai attendu presque un an avant de me lancer ! Et c’est complètement par inadvertance (le fameux « coup du sort ») que j’y ai été amenée. L’école avait organisé une journée de voyage de fin d’année à 2 heures de route. Sauf que, sur la route du retour, nous avons eu une panne de bus. On nous a débarqué le long de la route, près d’un grand champ bordé d’un bois. Et là, pendant 1h j’ai organisé avec les enfants une chasse au trésor qui s’est révélée un grand succès.
Alors, bien sûr, il y avait mes collègues, mais j’ai pris en charge (parce que j’étais en fait – mais je n’en avais pas conscience – déjà préparée à l’action). Je n’arrivais seulement pas à sauter le pas.
Donc, ne vous laissez pas paralyser par la peur, le manque de confiance que vous pouvez ressentir. Votre envie de vous lancer vous rend légitime, quoi qu’il arrive !
PANNEAU n°2 : Le labyrinthe
L’une des principales idées reçues par rapport à la pédagogie par la nature est en effet la croyance (limitante !) que c’est trop compliqué et infaisable ! Et, du coup, on reste où on est, on ne bouge pas. L’Ecole du Dehors reste au stade de projet, de rêve ou de fantasme !
Pour ma part, je ne savais pas par où commencer en termes logistiques et administratif : quel diplôme, quelles réglementations, quels documents, quelles assurances, quelles autorisations, etc. J’étais perdue ! C’est le manque de méthode qui m’a ralentie !
La solution que j’ai adoptée est extrêmement simple : j’ai découpé mon projet en étapes, j’ai fait un tableau récapitulatif de toutes les obligations auxquelles j’étais confrontées. J’ai finalement obtenu une dizaine de lignes, que j’ai ensuite prises les unes après les autres. J’ai repéré mes interlocuteurs pour chacune de ces lignes, j’ai inséré leurs réponses et les démarches à réaliser, pas à pas. Et, progressivement mais en 1 mois seulement, j’avais décodé les méandres du labyrinthe, j’avais trouvé la sortie !
Eviter de tomber dans le panneau du labyrinthe requiert donc de vous poser, de faire le vide, et de poser les choses calmement, progressivement sur le papier. Puis d’entrer en contact direct avec l’administration, votre hiérarchie, les parents, etc.
PANNEAU n°3 : Le lieu sacré
Figurez-vous que j’ai passé 6 mois à rechercher un lieu pour y installer mes séances dehors. Un temps et une énergie invraisemblables passés à dénicher un endroit qui correspondait à l’idéal du « lieu parfait » que je m’étais forgé. Et vous savez où nous nous sommes installés, finalement ? Au sein de l’école ! Je rappelle que c’était une école rurale, entourée d’arbres, avec des bâtiments en U autour d’une grande cour herbeuse. Pourquoi ? Et bien parce que c’était à la fois le plus simple au niveau logistique et surtout parce que ce lieu était en fait parfaitement adapté aux enfants : grande visibilité, permettait d’accueillir tout le monde, une riche biodiversité, des textures (sol en terre, sable, herbes, fleurs, etc.), présence d’eau et de haies, bref, le lieu était sous mes yeux et je ne l’avais pas vu !
L’une des erreurs communes est de fantasmer son lieu, de s’imaginer un paradis dénué de contraintes. Or mon expérience et celle de nombreuses autres personnes dont j’ai recueilli les témoignages sur plusieurs années, m’ont montré que la sobriété heureuse est parfaitement adaptée à l’école du Dehors. Au fil de mes recherches, j’ai établi une fiche récapitulative d’une trentaine de critères à cocher lors de visites de lieux.
Et c’est souvent au plus près de chez nous ou de l’école, ou de la crèche ou même au sein de ces espaces que l’on peut trouver son bonheur. Beaucoup de citadins me confient leur manque d’espaces naturels. Mais le petit espace de jeu en bas de l’immeuble est déjà, pour un enfant, un petit paradis. Le trajet entre l’école est le parc contient mille occasions de dénicher de la nature dans l’espace urbain… Le lieu aura la richesse que vous lui donnerez aux yeux des enfants !
PANNEAU n°4 : Le nerf de la guerre
L’un des aspects qui m’a le plus paralysée avant de me lancer dans mon initiative associative d’école-forêt (quelques années après mon expérience en tant qu’enseignante), a été celui de l’argent. Je retrouve cette paralysie chez de nombreuses personnes qui veulent se lancer dans une initiative éducative en nature. Alors, oui, il ne s’agit pas d’être angélique ou de vivre dans le monde des bisounours où les questions financières n’existent pas. Mais, de mon expérience, les gens qui se lancent dans l’Education en nature ne sont jamais les plus fortunés, la plupart d’entre nous avons très peu de moyens, que nous soyons enseignants, éducateurs de jeunes enfants ou parents. Alors comment faire ? Le maître mot ici est celui de « Progression » : commencez tout petit ! modestement…
A l’école comme en association (ou même en format entreprise, si vous montez votre structure), la meilleure solution à mes yeux est de démarrer progressivement : enseignants et éducateurs, sortez quelques heures par semaine au départ (déjà, vous prendrez confiance en vous tout en vous fatiguant moins !).
Les porteurs de projets, accueillez 6 enfants et avec leurs parents, durant 2heures, le mercredi, par exemple, et sur un lieu qu’on vous prête. Pas d’achat intempestif, pas de gros prêts bancaires, pas de gros partenariats, pas de gros frais d’inscriptions, etc.
Testez-vous, voyez si la mayonnaise prend.
A partir du moment où des personnes vous suivent dans votre projet parce qu’ils voient que vous assurez, ils commencent à partager votre enthousiasme et vous allez commencer à bénéficier d’un réseau. Qui dit réseau dit plus de moyens, dit des personnes ressources qui vous libère du temps pour prospecter financièrement (subventions, appels à projets, collectes de dons, etc.).
Lentement mais sûrement, vous vous installerez dans le paysage, vous en deviendrez un acteur incontournable, et vous aurez tout loisir de monter vos frais d’inscription ou le montant de vos demandes de subvention.
PANNEAU n° 5 : Programme, risques et botanique !
Last but not least ! L’obstacle majeur au premier pas dans le monde de l’éducation par la nature est … (roulement de tambour !) le sentiment de ne pas maîtriser la pédagogie par la nature ! J’angoissais surtout à ces 2 idées : comment vais-je réaliser le programme (de maternelle et d’élémentaire) ? et Comment vais-je leur expliquer les plantes et tout ça alors que je n’y connais rien en environnement ? Finalement… qu’est-ce que je risque à emmener les enfants dehors ? Et qu’est-ce que nous y gagnons, eux et moi ?
Et puis, un beau jour, je suis sortie avec eux pendant deux heures, on s’est posé tout un tas de questions auxquelles je n’avais pas toujours la réponse, on a bricolé avec des bouts de bois, on s’est perdus, on a retrouvé notre chemin, et puis, une fois rentrés, on a cherché des réponses.
Et puis, le soir, je me suis aperçue qu’on avait balayé – sans le faire exprès ! – les 5 grands axes du programme de maternelle :
- On avait mobilisé le langage dans toutes ses dimensions, orales et écrites (c’est tellement plus amusant d’écrire son nom dans la terre que sur une feuille de papier !),
- On avait développé leurs capacités motrices et d’équilibre à force de grimper sur des troncs d’arbres, on avait débattu sur la présence des animaux et le pourquoi du comment des nids et des terriers, et tout cela en apprenant à coopérer,
- On avait imaginé, dessiné et sculpté des œuvres d’arts naturelles,
- On avait compté et ordonné les bâtons, les glands et les feuilles,
- On avait fini par se repérer dans le temps (bon, on était un peu rentrés en retard !) et dans l’espace !
- Et on avait exploré tout un monde d’éléments vivants et de matières nouvelles !
Alors, bien sûr, on ne fera pas tout à chaque fois avec tous les enfants, bien sûr, chacun ira à son rythme (comme en « école du dedans », d’ailleurs !), bien sûr, on évitera de toucher et de porter à sa bouche les plantes inconnues, bien sûr, vous direz « je ne sais pas » un sacré nombre de fois au début !
Et alors ?
Vous aussi, vous êtes tombé.e dans le panneau ? Vous avez des conseils ou des besoins à partager ? Dites-le nous en commentaires 🙂
4 Responses
Très bon article qui va sans doute, rassurer et motiver les plus frileux… BRAVO !
Je découvre le site et le projet ! Cela me fait écho car je passais mon temps dans un petit bois étant enfant. Je pouvais rester des heures dans les arbres ! Merci pour toutes ces informations très utiles et enrichissantes 🙂
Merci Valériane!!! Les arbres, c’est la santé 🙂
Bonjour.
Merci pour votre article. Cela éclaire bien mon chemin. Je pensais être prête et en lisant votre article, je l’affirme : Je suis prête pour aller une après-midi par semaine avec mes élèves en forêt ! Hâte d’être le 21 mai pour notre première fois !